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6 décembre 2018 4 06 /12 /décembre /2018 14:12
Mountain Devil (c) Photo : Attila E Kaszo


C’est une bien triste nouvelle que nous avons apprise cette semaine. En effet, Kathleen  Petyarre est décédée le 24 Novembre 2018 à Alice Springs à environ 80 ans.

Née entre 1931 et 1940 sur le vaste domaine désertique de sa famille, Atnangker, situé près de la communauté d’Utopia, à 270 kilomètres au nord-est d’Alice Springs, cette artiste appartenait à un groupe familial qui réunissait parmi les plus grandes artistes aborigènes du XXème siècle : Emily Kame Kngwarreye, Lilly Sandover Kngwarreye, Gloria Petyarre, mais aussi une des plus grandes artistes de notre époque : Abie Loy Kemarre, sa petite-fille. Elle faisait ainsi partie de la génération qui participa au développement de la peinture aborigène contemporaine à Papunya, Yuendumu puis Utopia.

Kathleen Petyarre ou « Kweyetwemp », de son nom traditionnel, commença à pratiquer l’art du batik sur soie en 1977 grâce à l’arrivée à Utopia d’une éducatrice, Jenny Green, venue enseigner cet art aux femmes de la communauté. L’artiste utilisa cette technique jusqu’à l’introduction dans sa communauté de la peinture à l’acrylique grâce à Rodney Gooch, en 1987. Cette découverte donna une nouvelle impulsion à la production artistique de l’artiste qui découvrit en l’acrylique son medium de choix.

Kathleen Petyarre était la gardienne d’un mythe hérité du Temps du Rêve, celui de la « Femme-Lézard » Arnkerrth, dont les lézards du désert appelés « Moutain Devils » (à cause de leurs piquants semblables à des cornes) sont l’incarnation.
Arnkerrth est la gardienne de mines d’ocres que les Aborigènes utilisent afin de réaliser des peintures corporelles ou sur sol. Elle est aussi une divinité législatrice qui fixa les règles de vie des femmes du groupe familiale de l’artiste. C’est donc tout naturellement que dans ses oeuvres Kathleen Petyarre célébrait cet esprit ancestral à travers des cartes mythiques peintes comme vues du ciel.

Ces peintures acquirent rapidement une grande notoriété. Ce qui frappait le plus le public était le caractère contemporain de ces œuvres. Totalement abstraites pour un public profanes, elles décrivaient en fait, vues du ciel, les déambulations d’Arnkerrth à travers son territoire. Sans compter l’extraordinaire talent et modernité dont l’artiste faisait preuve dans la maîtrise du dot painting (ou « pointillisme ») propre aux peintures religieuses traditionnelles sur sol.
 
Les conservateurs de musées à travers le monde ne s’y trompèrent pas puisqu’on retrouve ses œuvres accrochées aux murs des plus grands musées australiens mais aussi en France au musée du Quai Branly – Jacques Chirac, au musée des Confluences à Lyon, au Metropolitan Museum à New York, etc.
 
Kathleen était également une guérisseuse traditionnelle et pouvait communiquer avec les esprits de ses parents. Quand on l’interrogeait sur ce qui lui manquait le plus, elle évoquait toujours son enfance, libre sur les terres de ses parents et souhaitait y retourner un jour définitivement.

Avec elle, c’est une des plus grandes artistes aborigènes que nous venons de perdre.
 
Voici ci-dessous de multiples informations qui vous permettront de découvrir un peu plus cette artiste exceptionnelle :
 
Visionnez la vidéo tournée en 2010 de la résidence d'artiste de Kathleen Petyarre et Abie Loy Kemarre à l'abbaye de Daoulas qui avait été organisée dans le cadre de l'exposition "Grand Nord-Grand Sud. Artistes Inuits et Aborigènes" réalisée par l'EPCC Chemins du patrimoine en Finistère en co-production avec le Musée des Confluences - Département du Rhône.
 
Le Docteur Christine Nicholls de la Flinders University est la grande spécialiste de l’œuvre de Kathleen Petyarre. Elle a écrit une monographie sur son œuvre – " Genius of Place". Lisez ici un très bon article en anglais qu’elle vient de publier dans The Conversation et qui nous a beaucoup aidé à écrire notre post.
 
 
Collections publiques (sélection)

·  Musée des Confluences, Lyon
·  The Metropolitan Museum, New York
·  Musée du quai Branly -Jacques Chirac, Paris
·  Collection privée de la reine Elizabeth II d'Angleterre
·  Seattle Art Museum, Seattle, USA
·  The Art Gallery of Western Australia, Perth, Australie
·  Musée d'Art Aborigène, Utrecht, Hollande
·  National Gallery of Australia, Canberra, Australie
·  National Gallery of Victoria, Melbourne, Australie
·  Art Gallery of South Australia, Adelaïde, Australie
·  Art Gallery of South Australia, Adelaïde, Australie
·  Museum and Art Gallery of the Northern Territory, Darwin, Australie
·  ATSIC Collection, Adelaïde, Australie
·  Edith Cowan University, Perth, Australie
·  Flinders University Art Museum, Adelaïde, Australie
·  Museum Puri Lukisan, Ubud, Bali, Indonesie
·  The Kluge-Ruhe Collection, University of West Virginia, USA
·  Peabody Anthropology and Ethnology Museum, Havard University, USA
·  The Essel Collection, Vienne, Autriche
·  The Holmes à Court Collection, Perth, Australie
·  The John W. Kluge Collection, Charlottesville, USA
·  The Kelton Foundation, California, USA
·  University of South Australia Art Museum, Adelaïde, Australie

Kathleen Petyarre - Stéphane Jacob - Abie Loy Kemarre

 

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12 janvier 2017 4 12 /01 /janvier /2017 12:12

Kathleen Petyarre, "Mountain Devil Lizard Dreaming", colleciton Musée des Confluences, Lyon

 

 

 

 

(Kathleen Petyarre, "Le Rêve du Lézard Sauvage", Collection Musée des Confluences, Lyon)

Suite du post sur la collection Kaplan & Levi.

Ces deux collectionneurs américains passionés d'art aborigène ont fait dont d'une oeuvre de Kathleen Petyarre au Metropolitan Museum de New York. Cett artiste occupe une place importante dans la peinture aborigène contemporaine : née au début des années 1940 elle appartient en effet à la génération qui a participé au développement de celle-ci, à Papunya, Yuendumu, puis dans le reste du désert australien à partir de 1970. Elle-même est originaire du territoire Atnagkere situé au Nord-est d'Alice Springs et c'est à la fin des années 1970 qu'avec un groupe de femmes d'Utopia elle apprit tout d'abord la technique du batik avant de confier à la toile les motifs secrets hérités du Temps du Rêve, tout en animant des mouvements de revendication territoriale alors en plein essor. C'est ainsi qu'elle participa tout d'abord à des expositions collectives de batik (1980 : Utopia Batik, Mona Byrne's Artworks Gallery, Alice Springs) puis de peintures (en 1989 pour la première et depuis régulièrement aussi bien en Australie qu'aux Etats-Unis – Boston, en 1990 ; Passadena, en 1990 etc – et en Europe – Allemagne, Pays-Bas, etc.). Sa première exposition personnelle en Australie date de 1996 et depuis son talent n'a cessé de s'affirmer comme en a témoigné, par exemple, la grande exposition de 2001 "Genius of the place" commentée par le livre-catalogue éponyme de Christine Nicholls et Ian North. Reconnue comme une des plus grandes artistes aborigènes, Kathleen Petyarre a également reçu de nombreuses distinctions telles le Vizy Board Prize en 1997, le People's Choice Award en 1998, etc.

Kathleen Petyarre, Stéphane Jacob, Abie Loy

Tout au long de sa vie, Kathleen Petyarre est retournée régulièrement dans sa communauté d'origine où elle initiait les femmes du clan à l'art de peindre. Elle est en effet la gardienne d'un mythe hérité du Temps du Rêve, celui de la Femme-Lézard Arnkerrth, dont les lézards du déserts appelés "Moutain Devils" (à cause de leurs piquants semblables à des cornes) sont l'incarnation actuelle. Arnkerrth, gardienne de mines d'ocres servant à réaliser des peintures corporelles ou sur sol, est aussi une divinité législatrice qui a fixé les règles de vie pour les femmes du clan de l'artiste. C'est donc un devoir pour celle-ci de la célébrer en organisant des cérémonies religieuses mais aussi en réalisant des peintures évoquant ses déplacements dans le désert et les sites devenus sacrés où elle s'est arrêtée.

Nous sommes fiers d'avoir fait découvrir en France le travail de Kathleen Petyarre et d'avoir facilité l'entrée d'une de ses oeuvres majeures dans les collections du musée des Confluences. Cette oeuvre est d'ailleurs reproduite dans "Aborigenes. Collections australiennes contemporaines du Musée des Confluences (Lyon)" co-écrit par Wally CARUANA, Barbara GLOWCZEWSKI, Pierre GRUNDMANN, Stéphane JACOB, Jessica de LARGY HEALY, Arnaud MORVAN.

Kathleen Petyarre nous a fait la joie de venir commenter en public en 2010 pendant le Parcours des Mondes (voir photos) une de ses oeuvres et de nous parler de son territoire sacré avant d'entamer une résidence d'artiste à Daoulas à l'occasion de l'exposition "Grand Nord-Grand Sud. Artistes Inuits et Aborigènes", à l'Abbaye de Daoulas (Bretagne) montée en collaboration avec le musée des Confluences. Une vidéo avait été tournée à cette occasion montrant Kathleen et sa petite-fille, Abie Loy, en train de peindre (visionner la vidéo ici).

Lire sur le site du MET l'annonce de l'arrivée de huit peintures aborigènes.

Voir des oeuvres des artistes d'Utopia.

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4 janvier 2017 3 04 /01 /janvier /2017 15:04

Suite de notre post sur la collection Kaplan & Levi où nous vous apprenions que ces deux collectionneurs américains passionés d'art aborigène avaient fait dont de huit toiles au Metropolitan Museum de New York.

Une de ces toiles est une oeuvre d'Abie Loy Kemarre. Proche parente des femmes artistes qui ont fait la renommée de l’école d’Utopia - Ada Bird Petyarre, Gloria Petyarre, Kathleen Petyarre et Emily Kngwarreye – et membre comme elles du clan Anmatyerr, Abie Loy  est née en 1972 dans cette communauté située, au cœur du désert australien, à 275 kms au nord-est d’Alice Springs.
Elle a commencé à peindre en 1994 sur les conseils de sa grand-mère, la célèbre Kathleen Petyarre, qui l’a guidée dans ses premiers travaux, inspirés des « rêves » dont elle est la gardienne rituelle : principalement celui de la “ poule du bush ” (Bush Hen Dreaming) - en fait un volatile assez proche de la dinde et qui, comme beaucoup d’animaux en Australie, a une valeur totémique pour certains clans aborigènes - et celui de la “ Bush Leaf ” dont cette toile est la célébration.
Abie Loy Kemarre a, en effet, rapidement acquis une manière propre qui rend son travail tout à fait remarquable et  explique certainement le nombre et le succès de ses expositions personnelles ou collectives en Australie tout d’abord depuis 1997 (Perth, Brisbane, Adélaïde, Melbourne ou Sydney) mais aussi aux USA (Miami, Seattle), en Indonésie ou encore en Europe (Allemagne, Espagne, France) et, d’autre part, sa présence dans la plupart des collections privées et publiques australiennes

Nous sommes fiers d'avoir fait découvrir en France son travail et d'avoir facilité l'entrée d'une de ses toiles monumentales dans les collections du musée des Confluences à Lyon. Cette oeuvre a d'ailleurs été utilisée pour illustrer la couverture du livre "Aborigenes. Collections australiennes contemporaines du Musée des Confluences (Lyon)" co-écrit par Wally CARUANA, Barbara GLOWCZEWSKI, Pierre GRUNDMANN, Stéphane JACOB, Jessica de LARGY HEALY, Arnaud MORVAN.

Une autre œuvre d'Abie Loy a également illustré la couverture du catalogue de l’exposition événement "Ancestral Modern. Australian Aboriginal Art » qui a eu lieu au Seattle Art Museum, en 2012 aux Etats-Unis.

Nous avions également invité Abie Loy et sa grand-mère en 2010 pour le Parcours des Mondes (voir photos) avant qu'elles n'aillent en résidence d'artiste à Daoulas à l'occasion de l'exposition "Grand Nord-Grand Sud. Artistes Inuits et Aborigènes", à l'Abbaye de Daoulas (Bretagne) montée en collaboration avec le musée des Confluences. Une vidéo avait été tournée à cette occasion montrant ces deux artistes en train de peindre (visionner la vidéo ici).

Les éditions Arts d'Australie • Stéphane Jacob ont ensuite publié le premier catalogue monographique sur son oeuvre : "Abie Loy Kemarre : Abstraction Lyrique", co-écrit par Jane Raffan et Stéphane Jacob. + d'info sur ce livre

Lire sur le site du MET l'annonce de l'arrivée de huit peintures aborigènes.Abie Loy : couverture du catalogue du musée des Confluences

Abie Loy et Stéphane Jacob au Parcours des Mondes en 2010

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20 octobre 2016 4 20 /10 /octobre /2016 11:44

Margaret Levi & Robert Kaplan ont constitué au fil des années l’une des plus grande collection privée d’art aborigène  aux Etats-Unis.


C’est en 1984 que Margaret Levi, originaire de Seattle, est invitée par la Research School of Social Sciences (Australian National University) en sa qualité de sociologue. C’est lors de ce premier voyage qu’invitée à un repas chez l’anthropologue Diane Bell (une des premières à avoir livré une étude approfondie sur les femmes aborigènes), elle découvre, accrochée au mur de son salon, une grande peinture acrylique de l'artiste aborigène Dick Leichleitner. Tombée en admiration devant cette œuvre, Margaret décide d’aller voir l’artiste à Alice Springs afin de lui commander une toile.

L'année suivante, Margaret retourne en Australie et, malheureusement, est victime d’un grave accident, renversée par une voiture. Sept ans plus tard, au bout d’un long procès, elle obtient finalement enfin des dommages et intérêts. Elle décide alors d’acheter immédiatement une peinture d’Emily Kngwarreye. Entre temps, Margaret épouse Bob et, ensemble, ils décident d’utiliser l'argent du dédommagement afin de constituer une collection de qualité muséale. Bien que l’art aborigène soit alors peu connu aux États-Unis et qu’aucun musée ne montre d’intérêt pour leur collection, Margaret et Bob continuent d’enrichir celle-ci, ne choisissant que des œuvres qui les fascinent, aidés en cela par des galeristes ou bien des directeurs de centres d’art qui repèrent pour eux les plus belles pièces.Cette collection commencée il y a plus de trente ans leur a permi d’accumuler de nombreuses pièces mais aussi des souvenirs inoubliables, comme celui de la regrettée Dorothy Napangardi. Cette artiste dont le travail les subjuguait était même venu passer « Thanksgiving » dans leur maison à Seattle, à l’occasion d’une exposition aux Etats-Unis. Bob se remémore d’ailleurs avec joie ce repas pendant lequel Dorothy leur avait fait part de ses talents de chasseuse de varan. En effet celle-ci arrivait à les stopper dans leur élan rien qu’en chantant.
 
Dès 1996, le Seattle Art Museum commence à exposer régulièrement des œuvres de leur collection pour créer par la suite une galerie permanente consacrée à l'art aborigène australien (la première grande galerie des Etats-Unis dédiée à cet art) grâce notamment aux généreux dons de Margaret et Bob.

La cote de l’art aborigène n’a cessé d’augmenter au fil des années, une œuvre de Clifford Possum Tjapaltjarri a d’ailleurs été vendue pour 2 millions de dollars en 2007 par la National Gallery of Australia. Dernièrement, une vente aux enchères à Londres a dépassé toutes les attentes de Sotheby’s (article ici).
 
Le dernier coup d’éclat en date de ces deux collectionneurs passionnés a été le don par leurs soins de huit toiles au Metropolitan Museum de New York.
 
L'entrée d'Abie Loy dans les collections du MET.

L'entrée de Kathleen Petyarre dans les collections du MET.

Visionner une interview filmée de Margaret Levi & Robert Kaplan

David Kaplan & Margaret Levi

 

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Présentation

  • : Le blog de la galerie Arts d'Australie • Stéphane Jacob, Paris
  • : Stéphane Jacob, diplômé de l'Ecole du Louvre, spécialiste de l'art australien contemporain, expert C.N.E.S. en art aborigène, a créé en 1996 la galerie Arts d'Australie · Stephane Jacob en France à Paris dans le XVIIe arrondissement. Expert en art aborigène. Membre de la Chambre Nationale des Experts Spécialisés en Objets d’Art et de Collection (C.N.E.S.) - Membre du Comité Professionnel des Galeries d'Art - Officier honoraire de l’Ordre d’Australie Retrouvez-nous sur www.artsdaustralie.com
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